26 août 2010
« C’est la caméra
stylo !» Cette phrase revient fréquemment, comme une
ritournelle, dans les conversations de cinéma. En général,
elle sert à décrire une manière de filmer,
légère et virevoltante.
Pourtant, cette notion, employée aujourd’hui
pour décrire un dispositif de tournage libéré des
contraintes de la technique, signifiait tout autre chose à
l’origine.
On la trouve pour la première fois en 1948 sous la
plume d’Alexandre Astruc dans un article au rôle
déterminant : « Naissance d’une nouvelle
avant-garde ».
Dans un contexte où le cinéma était
essentiellement perçu comme une forme de divertissement, Astruc
affirmait qu’il pouvait prétendre à une richesse
d’expression similaire à celle de la littérature, notamment
par une diversité des usages : «aussi bien critique
littéraire, roman, qu’essai sur les mathématiques,
histoire, vulgarisation, etc ».
Après avoir été utilisé pour
offrir du spectacle, ainsi que pour mettre en mémoire des moments et des
lieux, le cinéma allait s’accomplir, selon Astruc, en tant que
moyen d’expression, en tant que langage. « Un langage,
c’est-à-dire une forme dans laquelle et par laquelle un artiste
peut exprimer sa pensée, aussi abstraite soit-elle, ou traduire ses obsessions
exactement comme il en est aujourd’hui de l’essai ou du
roman. »
Dans son texte, Alexandre Astruc ne proposait pas de
libérer les appareils de prise de vue et de prise de son d’un
quelconque carcan afin de leur donner des possibilités
d’improvisations semblables à celles du stylo sur une feuille de
papier. Ce n’était pas son propos. La voie qu’il ouvrait se
voulait beaucoup plus large.
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